mardi 13 février 2024

Saint Valentin 2024

 

 La Saint Valentin 2024

 

La saint Valentin, tout comme Noël et bien d’autres fêtes sur lesquelles je vous ai souvent entretenus, s’inscrit dans ces fêtes créées pour lutter contre les pratiques et les coutumes corrompues du culte des idoles et des dieux païens. Après la chute de Rome en 476, on assiste à la décadence de l’Empire Romain d’Occident. Seule la religion conserve une organisation stable et forte. Les autorités de l’église, en reprenant certains rites, et en les « christianisant » tentent de donner un sens plus acceptable à des fêtes et à des coutumes, à une époque où les mœurs dégénéraient complètement en l’absence d’autorité capable de s’imposer. Ce sont tantôt des fêtes de la lumière et du soleil renaissant qui symbolisent si bien la venue de Jésus, Lumière du monde, de la Purification comme nous l’avons vu au début de ce mois, ou celles d’un saint, symbolisant par sa vie, son exemple et souvent son martyre, le rite qu’on célébrait alors, à l’appui de l’évolution du temps, des phases de la lune et du cycle de la terre autour du soleil, puisque ces choses-là ont une telle influence sur les humains et sur la nature, entre autres. C’est le cas de la saint Valentin. Voici pourquoi.

 

L’empereur Claude, dit Le Cruel, avait beaucoup de difficultés pour trouver des soldats pour ses multiples campagnes militaires. Il décida d’interdire le mariage de ses soldats car, pour lui, les hommes mariés ne faisaient pas de bons soldats. Valentin qui était prêtre de la religion chrétienne, décida alors de marier secrètement les jeunes amoureux. Pour avoir transgressé la loi, Claude le fit arrêter. On était en 268.

Dans sa prison, Valentin fit la connaissance de son geôlier qui avait une fille aveugle, du nom de Julia. Touché par la douleur de cet homme, il rendit la vue à cette enfant et convertit toute la famille à la religion chrétienne. L'empereur ne tarda pas à apprendre le miracle. Valentin fut battu, brisé par les coups de bâtons des soldats romains, pour être enfin décapité sur la voie flaminienne, le 14 février 268. On dit que Julia planta un arbre sur sa tombe. Cet arbre aux fleurs blanches légèrement teintées de roses, qui a commencé de fleurir en fin janvier dans nos régions méridionales était sans doute un amandier, symbole d’Amour et d’Amitié.

A la font de Nîmes

I a un amètlier

Que fa de flors blancas

Coma de papier .

Se canta que canta…(air connu).

 

Il existe à Rome une catacombe de saint Valentin, témoin de la vénération dont fut, de tout temps, entouré cet illustre martyr.

 

Sous le pontificat du pape Gélase, en 496, la fête de saint Valentin, fut instaurée le 14 février, la veille des grandes fêtes des Lupercales, pour tenter de faire disparaître ce qui était devenu une véritable « fête du sexe illicite ».

Il est amusant de constater, que ce pape Gélase, était né en Kabylie, à une époque où la terre d’Afrique du Nord était en grande partie chrétienne, - pensez aussi à saint Augustin !- .On peut dire que ce Gélase  est à l’origine du droit canonique, ne serait-ce que par ses lettres  qui traitent toutes de la gestion et de l’administration de l’église. Ce berbère, rétablit l’ascendant du pape sur l’autorité des empereurs : « Il y a auguste empereur, deux pouvoirs principaux pour régir le monde : l’autorité sainte des pontifes et la puissance royale. Des deux, celle des prêtres est d’autant plus importante qu’ils doivent, dans leur jugement divin, rendre compte au Seigneur des rois eux-mêmes. » (extrait d’un des fragments des 43 lettres conservées au Bristish Museum et publiées en 1885 à Liepzig).

C’est sous son règne très court (4 ans) qu’on vit apparaître le mot fabrique pour désigner la masse des biens affectés à la construction des églises, ce qui s’étendra ensuite à la masse des biens affectés à leur entretien, sous Grégoire 1er (590-604). C’est de là que viendront jusqu’à la séparation de l’église et de l’état, les conseils de fabrique, ancêtres de nos conseils de gestion paroissiaux, et c’est eux qui nous ont valu, ces fameux bancs de fabrique, que l’on voit encore dans bien des églises, bancs quelquefois très ouvragés, à ne pas confondre avec les stalles des chanoines et du clergé. C’est Gélase qui fit instituer un caissier spécial, un laïc, dans chaque diocèse, pour « réguler » le pouvoir trop important des évêques et leur avarice qui absorbait tous les revenus du diocèse au détriment des communautés.

Il est également important de noter que cette époque du pontificat de Gélase, fut une époque de grande de réformes. Il fallait suppléer à la décadence de l’administration romaine et organiser partout des règles pour régir les peuples. C’est ainsi qu’en février 506, à Aire sur Adour, le roi Wisigoth qui règne alors sur la région de Toulouse, fait publier un recueil de lois connu sous le nom de bréviaire d’Alaric. Ce document établit un nouveau droit à l’usage des Barbares et des Gallo-Romains et il confirme la prépondérance des premiers sur les seconds.

Ces précisions me paraissaient importantes pour expliquer la nécessité devant laquelle se trouvaient alors les pouvoirs en place, d’organiser la vie publique.

On comprend mieux cela quand on voit les débuts de dérapages de certaines fêtes, telle halloween, et la très large exploitation commerciale qui tourne autour de la saint Valentin. Il suffit d’ouvrir la télévision aujourd’hui !

 

Les Lupercales étaient une grande fête païenne de l'amour et de la fécondité.

La fête comportait trois actes :

- le sacrifice d'un bouc, sur les flancs du mont Palatin, dans la grotte où la louve, selon la légende, avait allaité Romus et Romulus, les jumeaux fondateurs de Rome ;

- la course des Lupercales au cours de laquelle des hommes à demi-nus vêtus d’une simple peau de bouc, courraient après les femmes et les cinglaient des lanières découpées dans la peau de la bête qu'on venait d'égorger. Les Romains prétendaient que les coups de lanières favorisaient la fécondité et la montée du lait chez les femmes.

Le dieu de la fête était Faunus, le maître des forces naturelles et de la fertilité.

un banquet qui dégénérait la plupart du temps en véritable orgie…romaine cela va de soi !

 

Ces fêtes qui avaient ainsi dégénéré, s’inscrivaient à leur origine, dans la lignée des cérémonies de purification et d’expiation des offenses commises envers les dieux. A cette occasion les maisons étaient traditionnellement nettoyées. Après avoir balayé les pièces intérieures, on les aspergeait de sel et de blé. C’est ce rite de la purification des maladies et des fièvres, « februa », qui est à l’origine du mot février.

 

De façon plus poétique, le rapprochement avec les amoureux pourrait aussi venir d'Angleterre, où on disait, au Moyen-Age, que les oiseaux commençaient à s'accoupler pour le 14 février.

Un vieux proverbe occitan dit la même chose de façon élégante :

« Per la San valentin, l'agasso mounto sou pin ; si noun li jai, ti tengues paga gai »

Proverbe qu'on peut traduire ainsi : pour la saint Valentin la pie monte sur le pin; Si elle n'y fait pas son nid, ne te réjouis pas trop vite.

 

Ce proverbe est lié à l'observation du temps de ce jour de milieu février, où la nature fait quelquefois ressentir les premiers frémissements d'un réveil du printemps.

Cette année encore le temps très doux est là pour notre plus grand bonheur, pas toujours celui des gérants des stations de ski ! enfin la nôtre, l’Aigoual... ! A inscrire au registre du « faut pas rêver » !

Si donc aujourd’hui les oiseaux ne commencent pas à faire leur nid malgré une température plus douce, c’est signe que l’hiver n’est pas fini !

Si vous voyez les pies commencer à faire leur nid ce sera meilleur signe ! Pour ma part j’en ai vu plusieurs ce jour veille de Saint Valentin.

 

On dit aussi que Charles d’Orléans, prisonnier en Angleterre après la défaite d’Azincourt, avait observé ainsi le jeu des oiseaux, et qu’il aurait alors imaginé d’écrire des messages d’amour et de tendresse à sa bien-aimée, messages qui sont devenus, après qu’ils aient été institués à la Cour de France, « les valentines », ces cartes décorées de cœurs et de cupidons, ornées de dentelles, de soie, de satin, de fleurs, voire aussi parfumées, qui apparurent à l’époque victorienne et que Monsieur Howland, papetier américain importa aux USA en 1848 et dont on dit que les Américains sont très friands…

 

La légende de saint Valentin traversa les siècles et en 1496, sur décision du pape Alexandre VI, saint Valentin devint le patron des amoureux, des fiancés et de tous les jeunes gens et jeunes filles, dont le comportement est si proche de celui des oiseaux… sans monter sur un arbre… ! …

 

Depuis 140 ans, les reliques de saint Valentin reposent dans l'église de Roquemaure, dans le Gard, au bord du Rhône. Culte des reliques… Influence des reliques ! mais quelles reliques, et de quel Valentin car il y a au moins 7 Valentins… La logique voudrait que ce soient celles du prêtre romain du 3ème siècle, à moins que ce soient celles du saint évêque de Terni, ou bien qu’il s’agisse du même, car l’histoire n’est pas très sûre à ce sujet.

Ce qui est plus sûr c’est que en 1866 le phylloxera fit son apparition dans le Gard à Aramon, puis à Roquemaure. Ce sont les « tâches de Roquemaure ». C’est la catastrophe. Le riche propriétaire du domaine de Clary, à Roquemaure, décide de faire l’acquisition, à Rome, d’un saint protecteur. Le 25 octobre 1868, l’évêque de Nîmes, Monseigneur Plantier, célèbre l’arrivée des reliques, dans une grande liesse. Sur la place de la Pousterle, le panégyrique de saint Valentin est dit en présence d’une foule immense qui ensuite accompagne les reliques vers la collégiale où désormais elles demeurent dans une chasse. En 1988, le curé de Roquemaure, l’abbé Durieu propose de commémorer cet évènement et d’organiser chaque année une grande fête de l’amour et de l’amitié, si bien que Roquemaure est devenue, dans notre région, la capitale des amoureux avec sa Festo di poutoun. En 1995, Monseigneur Cadillac évêque de Nîmes a présidé ces cérémonies leur apportant un regain d’intérêt. Des festivités remarquables ont lieu chaque week-end proche de la saint Valentin. Les gens du pays, habillés comme en 1868, font revivre les métiers d’autrefois, et défilent en cortège (plus de 800 personnes). Mais cette année pour cause de froid ces fêtes viennent d’être annulées. 

Roquemaure, c'est le village où fut chanté pour la première fois, « Minuit Chrétiens » le fameux cantique écrit par Placide Carpeau, enfant du pays. Il était interprété par Emilie Laurey, dans l’église de Roquemaure, accompagnée sur le magnifique orgue qui date de 1690. On était le 24 décembre 1847. Mais cela c'est une autre histoire !

Quant à la relation entre saint Valentin et le phylloxera, il n’y a, à ma connaissance, aucune relation…pouvoir des reliques… !

Bonne fête des amoureux, Bonne fête des amours, Bonne festo di poutoun (des bisous…) comme on dit à Roquemaure.

 

Pour ce qui est du temps, des proverbes et de la lune :

« Tel temps le jour de la saint Valentin, tel temps au printemps qui vient. »

Mais aussi :

« Valentin et Faustin font gelée sur leur chemin ! »

La courbe lunaire a commence de descendre le 3, et la pleine lune était le 7. Le temps change aujourdh’ui car il y a un nœud lunaire.  Cela pourrait durer jusqu’à la nouvelle lune du 21. Mais nous ne serons rassurés qu’à la fin du mois : « février est un malin qui cache l’hiver au fond de son sac ! »

Ou bien : « Si février ne donne de la teste, il donnera de la quoueste. »

A moins qu’après la nouvelle lune le froid disparaisse ou revienne comme en 1956 où il y avait eu deux pointes à la fameuse vague de froid ! : « A la saint Florent l’hiver cesse ou reprend ». Ce pourrait être le 24 pour la saint Mathias : «  Saint Mathias brise la glace, S’il n’y en a pas, il en fera. »

Il est plus prudent d’attendre un peu pour entreprendre la taille des arbres et arbustes de toute sorte et donc de vos rosiers. On peut par contre épandre du compost ou du fumier dans votre jardin. C’est un bon exercice physique pour se désengourdir du froid.

 

Un autre anniversaire important en ce 15 février, la Convention, en 1794, impose le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge. Le décret, pris à l’initiative du pasteur André Jeanbon, dit Jeanbon Saint André, député de Montauban, prit effet à compter du 1er prairial an II (20 mai 1794) mais cette décision eut bien du mal à s’imposer puisqu’il fallut attendre la troisième république et le président Jules Grévy, pour que cet emblème soit solennellement consacré, le 14 juillet 1880 par sa remise à tous les corps de l’Etat.

 

Le 21 février, c’est mardi-gras, jour de carnaval. « Carnaval » vient de l’italien « carnalevare » signifiant « sans viande », « enlever la viande » car la période qui va suivre le Mardi Gras sera une période de jeûne.

Dans les pays anglophones on nomme ce jour Fat Thuesday, Shrove Tuesday ou encore Mardi Gras day.

En général on ne mange pas de gras pendant le carême. La veille du début du carême, le Mardi Gras, les gens avaient pris l’habitude, dit-on, d’utiliser ce qui reste de graisse pour faire des fritures, beignes, bugnes, beignets, bougnettes dans le Midi ou oreillettes. Il était aussi de coutume d’arrêter de manger des œufs durant le carême. C’est pour cela que se serait instaurée la tradition de faire des crêpes, en lien avec l’origine des crêpes du début de ce mois de février. C’est pourquoi le Mardi Gras est aussi appelé le Pancake Tuesday.

A la mi-carême, temps de pause au milieu du carême, on refait souvent des crêpes. Et l’accumulation des œufs qu’on n’a pas pu manger durant le carême amènera tout naturellement la tradition des œufs de Pâques, et le lundi de Pâques, l’omelette !

Ce 14 février 2024 c’est le Mercredi des Cendres, l’entrée en carême des chrétiens, 40 jours avant la fête de Pâques. C’est la commémoration des quarante années de marche du peuple hébreu dans le désert, et du jeune du Christ dans le désert lui aussi. C’est un temps de réflexion et de prière. Un temps d’appel à la conversion. Lisez ce qu’écrivait de façon imagée, le très grand évêque d’Arles, saint Césaire : « Ne tarde pas, convertis-toi et ne diffère pas de jour en jour. Ce sont les paroles de Dieu et non les miennes. Mais toi tu réponds : demain ! demain ! (En latin du texte : « cras ! cras !) Quel croassement de corbeau ! Comme le corbeau envoyé de l’arche n’y est pas revenu et, maintenant qu’il est vieux, dit encore : demain ! demain ! C’est le cri du corbeau : tête blanche et cœur noir. Demain ! demain ! c’est le cri du corbeau : le corbeau n’est pas revenu à l’arche, la colombe est revenue. Qu’il se perde donc, le croassement du corbeau, et que se fasse entendre le gémissement de la colombe » Saint Césaire d’Arles (469 – 542)

Vous noterez que pour atteindre le chiffre symbolique de quarante, il ne faut pas compter les dimanches. Ainsi on tombera sur la fête de Pâques, dont la date reste déterminée par le cycle de la lune, et donc ne tombe jamais à la même date dans nos calendriers !

 

Rendez-vous en mars !

A diou sias !

                                                                                                       Jean Mignot 13 février 2024