samedi 21 juin 2025

" Faites de la musique "

 

Qui a inventé la fête de la Musique ?

 En 1982, M. Jack Lang, ministre de la Culture, lance la première édition de la fête de la musique en France. Cependant il faut remonter à l'année 1976 pour connaître la véritable histoire de la fête de la musique et même bien au-delà ! Cette année-là, Joël Cohen, un musicien américain qui travaillait pour France Musique, propose des « Saturnales de la Musique » le 21 juin et le 21 décembre - une programmation musicale spéciale diffusée toute la nuit, pour fêter en musique les deux solstices. La première édition a lieu le 21 juin 1976.

Il se trouve qu’à la même époque, le compositeur Maurice Fleuret est aux commandes d’une émission hebdomadaire sur France Musique. Le concept de Joël Cohen aurait-il inspiré le futur Directeur de la Musique et de la Danse de Jack Lang  ?

Quelques années plus tard, le 10 juin 1981, la « Fête de la Musique et de la Jeunesse » est organisée pour célébrer l'élection du Président François Mitterrand, un concert gratuit place de la République à Paris réunit environ 100 000 personnes.

Jack Lang et Maurice Fleuret s'inspirent de cet évènement festif et des « Saturnales de la Musique » de Joël Cohen pour créer la Fête de la Musique dont le titre était initialement « Faites de la musique ! » afin d'inciter les amateurs à se produire en France. Et ça marche ! Le 21 juin 1982, jour de la première Fête de la Musique officielle, les musiciens envahissent les bars, les parcs, les rues pour le plus grand bonheur des citoyens.

Quelle que soit l’origine de la Fête de la musique, à ses débuts, personne ne pouvait imaginer un tel succès populaire.

C'est "une révolution dans le domaine de la musique, qui tend à faire se rencontrer toutes les musiques – sans hiérarchie de genre ni d’origine – dans une commune recherche de ce que Maurice Fleuret appelait « une libération sonore, une ivresse, un vertige qui sont plus authentiques, plus intimes, plus éloquents que l’art », raconte le site officiel de la fête de la musique.

Reprise dans plus de 110 pays à travers le monde, la Fête de la Musique est aujourd'hui célébrée dans plus de 350 villes et 120 pays.

Mais pourquoi la fête de la musique a lieu le 21 juin ?

Jour du solstice d'été, le 21 juin est la nuit la plus courte de l'année dans l'hémisphère nord. Un jour symbolique qui signe le début des beaux jours et un temps qui incite à faire la fête jusqu'à l'aube.

Pourtant le symbolisme qui relie Fête de la Musique et solstice d’été ne sera pas toujours une réalité car la décision de 1982 ne tient pas compte de l’évolution du calendrier. En 1582, le calendrier « grégorien » celui en vigueur de nos jours, a adapté les dates des solstices et équinoxes pout être au plus près de la durée du cycle du soleil. Ainsi le solstice peut intervenir le 19 juin le 20 juin, le 21 et même le 22. Le solstice d’été sera le 22 juin en 2203, 2207, 2211 et 2215, puis en 2304. En 2488 le solstice sera le 19 juin et ce sera la première fois depuis la mise en place du calendrier « grégorien ». Notez-le, on ne sait jamais !

Notre Fête de la Musique restera le 21 juin.

D’où ma question : qui est donc le véritable inventeur de la fête de la Musique, bien au-delà de ce que je viens d’écrire.

Si on fait un grand bond en arrière, on trouve une autre origine d’une fête de la musique, celle-là étroitement liée au solstice qui selon les règles du calendrier « Julien » était toujours et invariablement le 24 juin, tout comme celui d’hiver le 24 décembre. D’où la fête de Noël le 25 décembre et le 24 juin la fête de la naissance de Jean-Baptiste, le précurseur, celui qui annonçait la naissance de Jésus.  Ce faisant l’église sublimait des fêtes qui depuis la nuit des temps célébraient le soleil vainqueur des ténèbres avec notamment des feux de joie devenus nos Feux de la Saint Jean.

Un chant grégorien (hymne à Saint-Jean-Baptiste écrit par Paul Diacre, né en 730, mort vers 799), possédait une caractéristique intéressante : chaque vers commençait sur une note plus haut que le vers précédent. Or jusqu’à cette époque les notes étaient choisies dans les premières lettres de l’alphabet, ce qui est encore le cas dans certains pays anglo-saxons.

 Guy d’Arezzo, un moine bénédictin de cette belle ville entre Toscane et Romagne, qui vivait de 992 à 1033 en recherchant à la fois un système de notation facile et une codification des intervalles musicaux, a imaginé ce qu’on désigne aujourd’hui par le mot de « gamme », en prenant les premières syllabes de cet hymne de la fête de Saint Jean-Baptiste pour baptiser les notes de la gamme .

Voici ce chant, avec la mélodie et la traduction :

Ut queant laxis

do re fa (remi) re

Que tes serviteurs chantent

resonare fibris

re re do re mi mi

D’une voix vibrante

Mira gestorum

(mifasol) mi re (fado) re

Les admirables gestes

famuli tuorum

fa sol la (solla) re re

De tes actions d’éclat.

Solve polluti

(sollasol) mi fa sol re

Absous des lourdes fautes,

labii reatum

la sol la fa (solla) la

De leurs langues hésitantes

Sancte Joannes

(solfa) re do mi re

[Nous t’en prions,] Saint Jean.

 

Le Si est en fait venu plus tard. Il vient des initiales SJ du dernier vers.

Ut est devenu Do, parce que Ut était une syllabe trop difficile à chanter (le choix pourrait venir de la première syllabe du mot Domine, Seigneur ou Dieu en latin).

On attribue cette création à Anselme de Flandres, un musicien du XVI e siècle . Cette création se retrouve dans les écrits de Giovanni Maria Bononcini au XVIIe siècle et Pierre l’Arétin, lui aussi natif d’Arezzo parle du « do » en 1536.

Certains pays (Allemagne et pays germanophones, Angleterre et pays anglophones) n’utilisent pas cette nouvelle dénomination et ont conservé l’ancien système inspiré de l’Antiquité, qui consistait à nommer les notes par les premières lettres de l’alphabet. Voilà pourquoi le blues et le jazz, musiques d’origine américaine, notent aujourd’hui les harmonies grâce à des lettres :

Cela donne :

Système latin

Système anglophone

Système germanophobe

do

C

C

D

D

mi

E

E

fa

F

F

sol

G

G

la

A

A

si

B

H

 

Ceci est un fait remarquable que connaissent bien les bons amateurs de musique, ou qu’ils se doivent de connaître, avec quelques bémols, dièses et bécarre, apportés récemment en 1988 par MM Chailley et Viret dans La Revue Musicale. Ce serait dommage d’effacer cette jolie histoire ! Pour plus de détails voyez vos encyclopédies, par exemple l’Encyclopédia Universalis à l’article « Gamme ».

Il y a donc bien longtemps que la musique est au cœur du solstice d’été. Nos dirigeants et musiciens de 1976 et de 1982 connaissaient-ils  ce fait historique ?

Qui donc est le véritable inventeur de la Fête de la Musique ?  Jack Lang mais aussi Joël Cohen et Maurice Fleuret et avant eux Guy d’Arrezo, Giovanni Maria Bononcini, et sans doute d’autres qui tous à leur façon, tous ont contribué à la création de cette si belle fête qui marquent le jour de l’(année le plus long.

Mon intention est de rappeler ici, que depuis bien longtemps, on fête la musique en ces périodes où l’été prend ses marques, solstice ou pas !

Le 21 juin : faisons de la musique en pensant à tout ce qu’on leur doit !  et renouons avec la belle tradition des feux qui depuis la nuit des temps marquaient le solstice, Feux de la Saint Jean comme nos amis Catalans qui depuis le Canigou font descendre la flamme dans les villages des PO. Mais attention aux feux !

Adissias ! Jean Mignot

 

 

 

de la canicule

 par les temps qui courent ...

De la canicule

 

Canicule ne veut pas dire nécessairement « chaleur ». Dès que la température approche ou dépasse les 30 °, surtout depuis 2003 on utilise ce mot à tort et à travers. Ce mot avec le temps a changé de sens. C’est un mot qui vient du latin canicula, diminutif de canis (=chien) parce que la période du 24 juillet au 24 août est la période où la principale étoile de la constellation du Chien, Sirius, se lève et se couche en même temps que le soleil.

En Egypte antique, ce phénomène marquait le début de la saison de la crue du Nil et permettait de fixer le calendrier annuel. Dans la Rome antique, le début de la Canicule était célébré par la fête de Neptunalia (le 24 juillet), on lui attribuait de mauvaises influences (maladies causées par la chaleur et hurlements des chiens) et on tentait de conjurer l'influence néfaste de Sirius sur les moissons en immolant des chiens roux comme le soleil.

Les Anciens avaient alors pensé qu’il y avait un lien entre l’apparition de cette étoile et les grandes chaleurs.  Déjà Pline l’Ancien écrivait : « Quant à la canicule, qui ignore que, se levant, elle allume l’ardeur du soleil ? Les effets de cet astre sont les plus puissants sur la terre : les mers bouillonnent à son lever, les vins fermentent dans les celliers, les eaux stagnantes s’agitent. Les Egyptiens donnent le nom d’Oryx à un animal qui, disent-ils, se tient en face de cette étoile à son lever, fixe ses regards sur elle, et l’adore, pour ainsi dire en éternuant. Les chiens aussi sont plus exposés à la rage durant tout cet intervalle de temps ; cela n’est pas douteux. »

Les Romains sacrifiaient les chiennes rousses pour apaiser la Canicule. Il était de coutume de jeter au bûcher des chiennes au pelage roux. On trouve des traces de cette maltraitance du chien dans de nombreuses expressions. Une météo maussade et pluvieuse est qualifiée de « temps de chien » et la chaleur caniculaire trouve son origine linguistique dans la constellation du Grand Chien. L’animal réputé comme le meilleur ami de l’homme a bon dos. Bouc émissaire des maux humains on associe le chien à un grand nombre d’expressions négatives : « se faire traiter comme un chien » ; « être d’une humeur de chien » ; « être malade comme un chien » ; « arriver comme un chien dans un jeu de quilles » ; « se regarder en chiens de faïence » ; « mener une vie de chien » ; « avoir un caractère de chien » … Même les religions donnent une image négative et d’impureté.  La Bible et le Coran en donnent beaucoup d’exemples. 

Canicule ou thermidor c’est cette période qui a vu la chute de Robespierre et le rôle si important de « Notre Dame de Thermidor » la belle Madame Tallien, Theresa Cabarrus, dans ce grand changement.  Elle était apparue à l’Opéra, dans une tunique de soie blanche sans manche, et aucun sous-vêtement. Ce qui permit à Talleyrand, dont on connaît bien l’esprit d’à-propos de dire : « il n’est pas possible de s’exposer plus somptueusement ! » C’est vrai qu’elle avait pris des risques ! 

Henri Voulland, notre avocat uzétien eut un rôle important dans cette période trouble. En tant que Membre du Comité de Sûreté Générale il est signataire de l’arrêté qui conduisit Robespierre à l’échafaud.

Il nous reste lointain souvenir de cette époque le « homard Thermidor ». En réalité, il s’agit d’une recette créée au restaurant « Maire » à Paris, en hommage au drame « Thermidor » de Victorien Sardou. Pourquoi ce qualificatif ? eh bien peut-être parce qu’il faut couper le homard en deux alors qu’il est encore vivant ! A moins que ce ne soit qu’une histoire de sauce ! On imagine facilement la suite !

Thermidor a disparu du calendrier avec l’arrivée du premier Empire. Avec le décalage du cycle des astres, un jour la canicule tombera même en plein hiver et sera lors une période de froid et de gelées !

C’est donc un peu un contre-sens d’employer ce mot pour parler de chaleur. Il serait plus correct d’écrire ou de dire : « il fait chaud, comme pendant la canicule » c’est-à-dire comme pendant cette période qui va du 23 juillet au 24 août. On peut parler aussi de chaleur « caniculaire ».

Il est considéré qu'une canicule correspond à une température de nuit supérieure à 18-20 °C et une température de jour supérieure à 30-35 °trois jours de suite. En France métropolitaine, la période la plus propice aux canicules s'étend du 15 juillet au 15 août. Mais faut-il vraiment attendre que nos gouvernants déclenchent le « Plan canicule » pour fermer les volets aux heures les plus chaudes de la journée et boire de l’eau pour s’hydrater ! Ce n’est pas la canicule parce que le gouvernement ou le préfet l’ont dit ! C’est la canicule parce qu’il fait chaud, très chaud, ou trop chaud !  Ce n’est pas nouveau qu’il fasse chaud au mois de juillet ou en août Un peu de bon sens que diantre !

 

Longtemps les étés « caniculaires » ont eu lieu plusieurs années de suite par groupe de trois ou de quatre comme dans les années 1132 ou en Alsace, le Rhin pouvait être traversé à pied. En 1160, en France les récoltes d’avoine et de seigle sont complètement détruites par la chaleur. En 1303/1304 on peut traverser la Seine, la Loire et le Rhin à pied.

1331-1334, 1385 -1393 animaux et récoltes sont anéantis par la chaleur. En 1718 aucune pluie en France en avril et octobre. Chaleurs excessives en 1748, 1754, 1760 puis en 1778-1781 et à la veille de la Révolution en 1788. Il fait 36 ° pour les Trois Glorieuses les 27,28 et 29 juillet 1830. En 1947 on enregistre trois vagues successives supérieures à la moyenne des températures enregistrées, du 26 au 28 juin puis du 22 juillet au 4 août et ensuite du 14 août au 20 août. N’oublions pas la sécheresse et les chaleurs de 1976, et la canicule de 1983 qui frappe très fort Marseille. Ce sont les grosses chaleurs de 2003 dès la fin avril qui ont déclenché une prise de conscience de la nécessité de s’organiser. 

Certes les météorologues nous disent que les instruments de mesure avant l’invention du thermomètre et du baromètres n’existant pas, on ne peut se référer sérieusement à ces données. Mais l’histoire est là et on connait bien les conséquences des grosses chaleurs sur non seulement les récoltes et donc les famines et les épidémies, mais aussi sur les événements historiques, révoltes et autres.  Sans nier les effets du réchauffement climatique et l’effet de serre, alors qu’on n’avait pas le moteur à explosion, les avions et les énormes porte-containers sur les mers, ni le chauffage au fuel, il y a eu fréquemment des canicules. Emmanuel Leroy-Ladurie développe longuement cela dans ses ouvrages, notamment « L’histoire des Climats depuis l’an 1000 ». Mémoire quand on te perd !

Cette année le cycle de la lune correspond à cette période. Ce sera idéal pour contempler les étoiles vers le 24 juillet.  Nous penserons à Saint Jacques de Compostelle le 25 juillet en contemplant la voie lactée, faute de pouvoir suivre son chemin. En août nous pourrons observer les « larmes de saint Laurent », les Laurentides, ou encore les Perséides, dans les nuits autour du 10 août, puisque ce sont les nuits où l’on voit le plus d’étoiles filantes, baptisées si joliment du nom de ce martyre qui fut immolé sur un gril ! Je ne ferai pas d’autres rapprochements avec une pratique si courante en cette période estivale 

Avec Musset nous verrons au couchant la belle Vénus : « pâle étoile du soir, messagère lointaine, dont le front sort brillant des voiles du couchant, que regardes-tu dans la plaine ? » 

Et nous penserons à Racine et à Uzès avec ces vers si charmants dont Uzès n’a trop souvent retenu que le dernier :

« Lorsque la nuit a déployé ses voiles

La lune au visage changeant

Parait sur un trône d’argent

Tenant cercle avec les étoiles ;

Le ciel est toujours clair tant que dure son cours

Et nous avons des nuits plus belles que vos jours !

Adissias !